Quelles sont les bonnes pratiques de récolte ?

L’importance d’un bon défanage préalable

Les pomme de terre de conservation se récoltent à complète maturité. L’épiderme étant pleinement constitué,  cela facilite sa bonne conservation. Il est donc essentiel de s’assurer de la maturité des tubercules avant récolte des pommes de terre. Cette maturité peut être atteinte naturellement ou, dans la majorité des cas, induite suite au défanage.

L’élimination du feuillage permet un meilleur contrôle du calibre et une maîtrise de la qualité. Selon le type de culture et le volume de végétation à détruire, plusieurs méthodes de défanage peuvent être choisies ou utilisées de manière complémentaire : chimique, mécanique ou thermique.

Pour plus de détails techniques sur les options de défanage, reportez-vous à cet article source: https://www.arvalis-infos.fr/plusieurs-techniques-possibles-pour-defaner-les-pommes-de-terre-@/view-25277-arvarticle.html

Tenir compte des conditions pédoclimatiques

L’arrachage est une opération délicate, susceptible de provoquer des dommages aux tubercules. La prise en compte des conditions pédoclimatiques lors de l’arrachage diminue les risques d’endommagements liés à cette étape.

Lorsque la température est inférieure à 8°C, les tubercules ont une sensibilité accrue aux endommagements : les risques de noircissement interne et de fractures augmentent. Les tubercules sont fragilisés et ces fractures sont autant de points d’entrée pour les agents pathogènes responsables de pourriture.

En complément, l’arrachage des tubercules lorsque la température est élevée favorise les risques de germination et de pourriture. La chaleur extérieure fait augmenter la respiration des cellules, entrainant ainsi une hausse de température du tubercule qui provoque le démarrage de la germination.

Illustration de l’impact de la température de récolte sur la qualité de conservation des tubercules.

De telles conditions de chaleur sont un terrain favorable à la multiplication des agents pathogènes et au développement de pourriture. Par la suite le nombre d’heures nécessaires au refroidissement des tubercules peut provoquer leur déshydratation excessive.

Pour limiter ces impacts négatifs sur la qualité des tubercules, une température comprise entre 12°C et 18°C est appropriée pour l’arrachage.

 

Du matériel en bon état garant de la qualité

Pour la récolte et la préparation au stockage, il est essentiel d’utiliser du matériel et des machines en bon état afin de limiter les risques d’accidents pour le personnel et préserver la qualité des pommes de terre.

Le bon état des protections est à vérifier avant l’utilisation des matériels d’arrachage et de mise en stockage. Parmi ces protections figurent notamment les gainages caoutchoutés, les tapis amortisseurs de chocs, les matelas de fond de benne ou encore les protections en mousse.

Dans cette même optique, la vitesse de transit des tubercules doit être contrôlée pour réduire l’intensité des chocs entre les tubercules et entre le matériel et les tubercules.

La hauteur de chute maximale ne doit pas excéder 30 cm aux zones de liaisons entre deux équipements. Cette précaution est particulièrement importante car l’énergie cinétique accumulée constitue un des facteurs aggravants d’apparition des fractures ou du noircissement interne.

Pourquoi et comment évaluer la qualité du lot récolté à la sortie du champ ?

Pour une conservation optimale des lots de pommes de terre, l’évaluation de la qualité du lot dès sa mise en stockage permet d’anticiper son évolution au cours du temps et favoriser sa mise en marché. Découvrez ci-après les défauts de qualité des tubercules dû aux fractures, aux éraflures et au noircissement interne ayant lieu lors de la récolte.

 

 

Limiter les éraflures et les fractures

Qu’est-ce qu’une éraflure ? Quelles sont les causes d’apparition ?

Une éraflure est une blessure superficielle qui résulte d’une friction du tubercule et altère l’intégrité de l’épiderme. Les risques d’apparition d’éraflures augmentent avec une fertilisation azotée excessive, lors d’un défanage précoce, ou encore quand l’arrachage a lieu en sol très sec. Pendant la conservation, les risques de perte de poids et d’apparition de brûlures superficielles liée à l’application de produits anti-germinatifs sont accrus pour les tubercules éraflés.

 

Qu’est-ce qu’une fracture ? Quelles sont les causes d’apparition ?

Une fracture se définit par une rupture plus ou moins étendue et profonde des parois des cellules de la pomme de terre. Cet endommagement est en général visible directement après le choc. Bien que la variété de pommes de terre constitue un facteur important de sensibilité aux fractures, d’autres paramètres peuvent favoriser leur apparition: une pression de turgescence élevée (suite à de fortes précipitations ou une irrigation excessive), un manque de maturité du produit ou encore sa manipulation à basse température.

Au-delà des risques d’endommagements mécaniques et d’un défaut de présentation des pommes de terre, ces blessures sont des portes d’entrées pour des agents pathogènes tels que les champignons du genre Phoma et Fusarium et les bactéries des genres Pectobacterium et Dickeya (anciennement Erwinia), micro-organismes responsables de pourriture en conservation.

Comment prévenir l’apparition des éraflures et des fractures ?

Afin de limiter au maximum l’apparition de ces blessures, des précautions sont à prendre.

Il est recommandé de récolter à complète maturité, avec des conditions pédoclimatiques tempérées (ni trop sèches, ni trop humides, ni trop froides, ni trop chaudes). Lors de la récolte et jusqu’au stockage des pommes de terre, la prévention des chocs et la manipulation à température d’au moins 10°C ne doivent pas être négligées.

Limiter le noircissement interne

Qu’est-ce que le noircissement interne ? Quelles sont les causes d’apparition ?

Le noircissement interne de la pomme de terre est dû à l’apparition de pigments bleus-gris sous l’épiderme après l’oxydation de composés phénoliques.

La teneur en matière sèche des tubercules, liée au choix variétal et au contexte de production, ainsi que le niveau d’intensité des chocs constituent les principaux paramètres qui influencent l’apparition du noircissement interne. Après un choc, la pression interne du tubercule augmente et les membranes des cellules situées sous l’épiderme du tubercule peuvent se rompre ou simplement être lésées par le frottement des grains d’amidon. Ces évènements entraînent une réaction enzymatique responsable de l’apparition des symptômes.

Les symptômes du noircissement interne se manifestent sous forme de tâches foncées, aussi appelées tâches cendrées ou « bleus » des pommes de terre, situées plus ou moins profondément sous l’épiderme. Les symptômes apparaissent quelques jours après le choc reçu, au fur et à mesure de la progression de la réaction biochimique qui en est la cause. A basse température la sensibilité des tubercules aux chocs est accrue, et les risques de noircissement interne plus élevés. Si la récolte et la mise en stockage sont effectuées en conditions froides sur des tubercules à forte teneur en matière sèche, les pommes de terre peuvent subir des chocs dommageables mais les tâches cendrées caractéristiques ne seront révélées que plus tard, par exemple au moment de la mise en marché.

 

Comment diagnostiquer le noircissement interne avant l’apparition naturelle des symptômes?

Il existe une méthode de détection du noircissement interne qui permet d’évaluer la qualité d’un lot au moment de la mise en stockage.  Ce diagnostic rapide consiste en l’étuvage d’un échantillon du lot de tubercules,  qui accélère la réaction enzymatique responsable du noircissement interne. Ainsi, après 12 heures passées entre 25° et 30°C, les tubercules épluchés révèlent ou non la présence de tâches cendrées sous-épidermiques.

Lorsque les résultats des tests d’évaluation de noircissement interne et de fractures sont obtenus sur un échantillon de la récolte, on dispose alors d’indication de pilotage de la conservation du lot. Ces indications pourront être prises en compte pour la gestion du déstockage et de la mise en marché.

 

Pour plus de détails techniques et de recommandations sur les bonnes pratiques pour éviter les risques d’endommagement internes :

https://www.arvalis-infos.fr/preserver-les-tubercules-des-blessures-@/view-14079-arvarticle.html

https://www.arvalis-infos.fr/attention-au-risque-de-noircissement-interne-@/view-19697-arvarticle.html

Quelles sont les bonnes pratiques de stockage ?

Des pratiques à mettre en œuvre dès l’arrachage : déterrage et tri visuel

Après l’arrachage des tubercules, les étapes de déterrage et de tri conditionnent la bonne conservation du lot.

Le déterrage permet de débarrasser la récolte d’une grande partie de la terre dans laquelle peuvent se trouver des formes de conservation de parasites ou d’agents pathogènes responsables de graves dégâts, tels que l’apparition de pourriture. Un tri visuel avant la mise en stockage permet de retirer du lot les tubercules endommagés, voie privilégiée d’entrée des champignons et bactéries pathogènes et source de foyers infectieux dans le tas en conservation.

L’impact de la mise en tas

En tas, les tubercules situés en bas du tas subissent une forte pression, source d’endommagements mécaniques. Pour limiter les risques de fractures, d’apparitions de facettes ou de noircissement interne, les tas vrac ne doivent pas excéder une hauteur de 3,50 à 4 m. Dans l’idéal, cette hauteur maximale doit être homogène sur l’ensemble du tas en procédant à son nivellement après sa constitution.

Ces précautions facilitent la ventilation des tubercules au cours du stockage et apportent alors un gage supplémentaire de la qualité de conservation.

Préparer le local de stockage

En nettoyant et en désinfectant les locaux de stockage, les risques de persistance de parasites et d’agents pathogènes sont considérablement réduits. Des formes de « survie », dites formes de conservation, existent pour ces organismes et peuvent se maintenir à l’état latent des mois voire des années,  avant de devenir source de foyers d’infections. Ces actions préventives sont d’autant plus cruciales lorsque des problèmes sanitaires ont été identifiés au cours de la campagne précédente. Cette logique s’applique à tout matériel réutilisé et en contact avec les pommes de terre.

Pour assurer la sécurité du personnel et la salubrité des pommes de terre, il est obligatoire d’avoir recours à des produits de nettoyage et de désinfection des équipements homologués et aptes au contact avec des denrées alimentaires.

L’utilisation de ces produits doit s’effectuer selon la règlementation et conformément aux préconisations indiquées par le fabricant. La liste des produits homologués sur les pommes de terre est à retrouver sur le site https://ephy.anses.fr/ , ou sur la base de données Simmbad.fr pour retrouver la liste des produits biocides « TP04 : Désinfectants pour les surfaces en contact avec les denrées alimentaires et les aliments pour animaux ».

Depuis l’interdiction d’usage des produits contenant du chlorprophame (CIPC) au 8 août 2020 en France, les bâtiments ainsi que le matériel ayant été au contact de cet inhibiteur de germination doivent faire l’objet d’une attention particulière. Un protocole de nettoyage détaillé a été rédigé au niveau européen dans le but d’éliminer le maximum de résidus de CIPC et limiter la contamination croisée des tubercules stockés pour cette nouvelle campagne.

En savoir plus sur les bonnes pratiques de nettoyage: 

https://www.arvalis-infos.fr/pomme-de-terre-des-recommandations-pour-nettoyer-les-b-timents-de-stockage-@/view-32310-arvarticle.html

Ajuster la température et la ventilation

La maîtrise de la température et de la ventilation est essentielle pour assurer la bonne conservation du lot : l’absence et/ou la réduction de la vitesse de germination et du développement d’agents pathogènes. Le bon réglage de ces paramètres doit  s’accompagner d’une attention particulière sur le taux d’humidité brassé dans le local et l’homogénéité de distribution de l’air à travers le tas.

Ces paramètres doivent être considérés dès le début de la conservation.

Pour optimiser la ventilation, la règle est simple : ventiler avec de l’air plus froid que la température des tubercules. Une règle simple, mais souvent difficile à mettre en œuvre en l’absence de régulation automatisée de la température et de la ventilation.

Après la mise en conservation, il faut atteindre rapidement une température d’environ 12°C pour favoriser la cicatrisation avant de procéder au refroidissement à la température de consigne (pour réduire la pression germinative et sanitaire). Pour optimiser la ventilation, celle-ci doit être active lorsque la température de l’air extérieur est inférieure à celle des pommes de terre stockées. En effet, alors que ventiler avec de l’air froid favorise le séchage, ventiler avec de l’air plus chaud que la température des tubercules contribue à l’humidification du tas et à l’apparition des pourritures. Cette règle s’applique à partir d’une différence de température de 1°C, mais plus la différence est grande et plus la ventilation est efficace.

Adapter les stratégies de conservation pour contrôler la germination

Même s’ils ne doivent pas être mélangés dans une même solution antigerminative, il est possible de combiner à volonté les cinq produits homologués (dans le respect des doses pour chacun) en fonction des contraintes liées aux débouchés mais aussi aux éventuels cahiers des charges liés à la production.

La combinaison de ces solutions peut s’appuyer sur leur mode d’action, plutôt préventif ou curatif.

– Hydrazide maléique : une action préventive depuis le champ. L’application en cours de végétation de l’hydrazide maléique sur des plantes non stressées dès que le calibre des tubercules a atteint 25 mm, et au moins 2 à 3 semaines avant la date de défanage permet de disposer de tubercules avec une rémanence antigerminative dès la récolte. Intervenir avant ce stade, le seuil de division cellulaire des tubercules risque d’impacter le rendement, mais trop tarder, a tendance à amoindrir l’assimilation du produit et l’efficacité antigerminative induite.

Ainsi, une fois le calibre atteint, le choix de la meilleure combinaison météorologique permettra l’application le plus rapidement possible. Dans le cas de variétés à court repos végétatif et/ou de températures de stockage élevées, il est souvent nécessaire de compléter son action par une ou plusieurs applications complémentaires d’un autre produit antigerminatif en stockage. Les différentes expérimentations réalisées par ARVALIS ont montré que ce traitement préalable au champ facilitait, voire amplifiait, l’efficacité du contrôle de la germination externe et interne, tout en réduisant le coût des interventions complémentaires en stockage. Il est à noter que la rémanence antigerminative post-stockage en est ainsi aussi rallongée.

– 1,4 DMN et éthylène : une action préventive en stockage. Appliqués dans le bâtiment lorsque les tubercules ont convenablement séché, cicatrisé et été abaissés en température, avant un début de germination, ils permettent de maintenir la dormance des tubercules pour le premier et retarder et freiner la germination pour le second. Ils nécessitent des installations suffisamment étanches et convenablement ventilées. Une attention particulière doit cependant être apportée tout spécialement pour le 1,4 DMN vis à vis des variétés à la peau fine du marché du frais lavées pour éviter l’apparition de défaut de sélectivité. En ce qui concerne l’éthylène, il est préférable de l’utiliser dans un bâtiment bien étanche pour limiter les pertes de produit mais en prenant garde à bien gérer la teneur en CO2. En cas de thermonébulisation à la suite de l’éthylène, générateur et sondes doivent être enlevés afin de ne pas être endommagés par le brouillard de produit.

– Huiles essentielles de menthe et d’orange : une action curative plus efficace sur des germes peu développés. Ces deux produits volatiles agissent en détruisant les germes présents à la surface des tubercules. Leur efficacité à dose modérée est ainsi cautionnée par une application à un stade de développement précoce de ceux-ci (idéalement point blanc). Compte tenu de leur faible rémanence, les applications doivent être ainsi suffisamment rapprochées une fois le début de la germination. Le ralentissement de l’élongation des germes par la présence d’hydrazide maléique dans les tubercules facilite le délai de réactivité et permet souvent d’accroitre l’écart entre les traitements. Lorsque les germes dépassent le stade point blanc, il est préférable d’opter pour la dose unitaire maximale homologuée pour garantir une bonne efficacité tout en sachant que le marquage du germe sur les tubercules sera plus apparent.

Il n’y a donc pas une solution unique et uniforme pour remplacer les traitements inhibiteurs au CIPC mais bien un panel de solutions qu’il convient de composer au mieux en fonction de la stratégie de l’exploitation, en restant vigilant sur les traitements appliqués par thermonébulisation par rapport à la sécurité des installations et la sélectivité des traitements.

Source : Pomme de Terre Hebdo n°1299 – Adapter les stratégies de conservation pour contrôler la germination

Limiter la perte de poids des tubercules

Une fois les tubercules récoltés dans le local de stockage, il convient de s’assurer que le taux d’humidité de l’air ventilé est compris entre 90% et 95%. Ce niveau d’hygrométrie préserve le tas d’une perte en eau des tubercules (et donc en poids) et n’est pas source d’humidification du tas.

Pour en savoir plus :

https://www.arvalis-infos.fr/guide-de-production-de-la-pomme-de-terre-@/view-6164-arvarticle.html

 

Quelques solutions à mettre en œuvre pour maîtriser l’hygrométrie et limiter les pertes de poids lors de la conservation :

  • Un système de ventilation automatisé pour profiter de l’air à hygrométrie naturellement élevée selon l’heure de la journée.
  • La mise en œuvre d’un groupe froid en circuit fermé favorise le maintien d’une humidité élevée de l’air ambiant dans l’enceinte de stockage.
  • Un système d’humidification de l’air peut ajuster l’hygrométrie de l’air ventilé. Cet appareil doit être paramétré de sorte que les gouttelettes générées soient suffisamment fines et évitent l’apparition de condensation à la surface des tubercules. Pour limiter la perte de poids des tubercules, l’emploi de la brumisation doit avoir lieu après une phase préalable de séchage du tas et être coordonnée au fonctionnement de la ventilation «froide» ou du groupe froid. Ce type d’équipement doit être mis à l’arrêt plusieurs jours avant l’application des inhibiteurs de germination thermonébulisés.

Quelles pratiques de prévention pour assurer un maximum de sécurité sur l’exploitation ?

Les chantiers de récolte et de mise en stockage sont des situations à fort potentiel accidentogène et nécessitent une vigilance accrue. L’anticipation et la prévention sont les meilleurs alliées pour réduire les risques d’accidents.

Ainsi, la formation des opérateurs, et en particulier du personnel temporaire, ne doit pas être sous-estimée dans la préparation des chantiers. La propreté et l’entretien des matériels assurent également de la sécurité de l’environnement de travail.

Pour cela, quelques réflexes simples à appliquer:

  • S’assurer d’être correctement formé à l’utilisation des outils et des machines,
  • Utiliser des outils et des machines propres et en bon état de fonctionnement,
  • Procéder à la vérification d’un instrument ou d’une machine lorsque le matériel est à l’arrêt complet.